08 juin 2006

Arnaud s'abstient..




Projet PS :
"Pourquoi je me suis abstenu"
par Arnaud Montebourg


Paris, le 7 juin 2007

Aux militants rénovateurs

Après une longue nuit de discussion constructive entre socialistes où nos idées rénovatrices ont poursuivi leur chemin difficile au rythme du pas des éléphants, rencontré les habituelles résistances, tout en parvenant parfois et miraculeusement à convaincre, j’ai salué devant le Bureau national l’existence d’un projet en mesure de nous rassembler et de nous engager tous devant les Français.

J’ai néanmoins choisi de m’abstenir de l’approuver en l’état, en votre nom à tous.

Parce que ce projet ne tranche toujours pas les questions fondamentales qui nous attendront après la victoire espérée de 2007.

D’abord, le refus de la VIe République comme révolution assumée par les socialistes d’un système politique mourant et discrédité. Les réformes envisagées, qui sont toujours bonnes à prendre, ne s’attaquent pas à la structure présidentielle de la Ve République qui continuera à produire ses effets désastreux et dangereux en maintenant les mêmes principes d’irresponsabilité politique que nous combattons. La gauche au pouvoir risquera beaucoup, surtout le décalage avec les aspirations populaires qu’elle a le devoir de porter. La réconciliation des Français avec leur démocratie et leurs dirigeants politiques est loin d’être gagnée.

Ensuite, le refus d’assumer la confrontation avec la mondialisation dérégulée et libérale qui mène l’Europe dans une impasse économique, sociale et environnementale. Les outils du réarmement politique pour la régulation et le contrôle du capitalisme financier sont insuffisants et ne permettront pas le retour puissant en 2007 en France et en Europe du politique face au déchaînement des forces de l’économie et des marchés qui nous attend. Les progrès frileux, conformistes et apparents sur ce terrain ne sont pas à la mesure des graves problèmes dont la solution nous reviendra l’année prochaine.

Enfin, les propositions faites sur la question centrale de la répartition des richesses entre le capital et le travail, nous paraissent des proclamations utiles et méritoires mais artificielles et sans ampleur en raison de l’absence d’outil concret (fiscalité, politique salariale) pour les faire triompher.

La question posée par ce projet est donc celle de sa crédibilité. Aura-t-il la valeur papier et nominale de l’assignat ou aura-t-il la valeur profonde et réelle de l’engagement pour tous les socialistes ? Tous les doutes sont autorisés.

En outre, les rénovateurs n’ont pu que déplorer l’incapacité dans laquelle les 70.000 nouveaux adhérents, dont il faut saluer l’arrivée dans nos rangs, n’auront pas le temps en quelques jours de se saisir et d’améliorer ce projet qui finalement sera à prendre ou à laisser. Le droit d’enrichir le projet par des amendements nationaux est, pour la première fois dans l’histoire du Parti socialiste, retiré à ses militants.

Arnaud Montebourg, le 7 juin 2006

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