28 mars 2007

Une révolution douce...


"La VIe République, une révolution douce"
par Arnaud Montebourg

Ségolène Royal a donc repris sa liberté. Elle refuse de se laisser enfermer dans des compromis épuisants entre ce qu’il faudrait changer et tel intérêt qu’il faudrait préserver.

Elle ouvre désormais les portes et les fenêtres du système politique aux Français qui s’en sentent exclus et prépare, en portant fièrement cette perspective, le changement de régime. Ségolène Royal a décidé d’assumer une révolution douce de la politique en France. Dans un mois et demi, les Français pourront donc tourner la page de ce demi-siècle dans lequel ils ont été infantilisés par un système qui les rendait inaptes à choisir leur destin.

La délégation monarchique révolue, voici la construction démocratique où, à l’image de ces débats participatifs qui ont passionné les Français, ceux-ci vont pouvoir construire, infléchir, évaluer les décisions, les réformes et le chemin qu’ils décideront de prendre ensemble dans le pays.

C’est l’accomplissement du rêve que Pierre Mendès France détaillait dans sa République moderne.


La France doit être capable de bâtir des compromis durables, et ne doit plus se laisser livrer pour se réformer à des passages en force aux effets aussi dangereux qu’éphémères.
La VIe République, c’est l’outil politique dont la France et les Français ont urgemment besoin pour affronter les défis sociaux, économiques, européens et environnementaux .

D’abord, elle restaure la séparation des pouvoirs aujourd’hui disparue et engloutie dans la concentration et la confusion permanente des pouvoirs. Le rapport de notre ami sénateur Jean-Pierre Bel précise toutes les audaces et les novations de cette « révolution démocratique ».
Le Parlement, mieux représentatif de la société française disposera des moyens de contredire et de contrôler une haute administration trop puissante et un gouvernement lourdement coupé des réalités : abolition de l’article 49.3, des commissions d’enquête parlementaires libres, restriction du vote bloqué et de l’usage des ordonnances, fin du domaine réservé présidentiel en matière diplomatique et militaire, contrôle parlementaire des nominations, mandat unique pour les parlementaires, réforme du Sénat et introduction d’une part de proportionnelle, contrôle parlementaire de la construction européenne.

C’est par l’adhésion, la discussion devant et avec le pays qu’on réconciliera le souhaitable et le possible en entraînant les Français vers de nouveaux comportements permettant par exemple le respect des objectifs écologiques sur la protection desquels nous avons pris tant de retard, ou permettant par exemple encore le sauvetage collectif de notre système de santé miné par la dérive financière et l’irresponsabilité de certains acteurs.

La question des finances publiques, de la dépense, de l’impôt comme de la dette, est tout aussi au centre de cette stratégie du changement en profondeur. La Ve République autorise et encourage le mensonge officiel sur les comptes de la Nation, l’impunité à l’égard des manipulations gouvernementales, comme l’irresponsabilité des pouvoirs publics.

La VIe organisera la transparence des comptes publics et la cogestion majorité-opposition des fonctions de contrôle de l’exécution des décisions de finances publiques. La mise à disposition du Parlement, de la Cour des comptes, et l’augmentation des pouvoirs de contrôle de l’usage des finances publiques par l’opposition à la tête de la Commission des finances, selon les règles du parlementarisme britannique, c’est en soi un bouleversement considérable. La clarification de l’administration des territoires qui aujourd’hui ajoute au morcellement des compétences la superposition des structures, est également à l’ordre du jour de notre vaste chantier sixiémiste.

Ainsi, la VIe République réalise un déplacement du centre de gravité du lieu des décisions politiques. D’un homme seul imposant aujourd’hui sa décision présidentielle indiscutée et indiscutable aux autres pouvoirs, la VIe République rééquilibre et organise
devant le pays une mise en partage des problèmes et une mise en délibération des solutions.
A cet égard, l’entrée des citoyens dans le système politique est de nature à changer profondément la donne. En les constituant en contre-pouvoirs, ils pourront infléchir les grandes décisions, et participer aux compromis que nous auront à assumer dans l’avenir. C’est par l’ouverture du débat et par la recherche du compromis, qu’on réformera, par exemple, les retraites, dans le respect du plus grand nombre, en équilibrant et en répartissant justement les efforts que les Français savent inéluctables.
Le droit de pétition, inscrivant à l’ordre du jour des assemblées les questions à délibérer, le droit de provoquer des référendums d’initiative populaire, d’entrer dans les jurys citoyens chargés d’évaluer les politiques publiques et de proposer des ajustements, révolutionneront la prise de décision publique.

Mais ce grand projet jaurèsien est aussi social.
La réforme démocratique du système politique doit se transporter aussi dans le système productif, dans l’économie où la recherche du compromis entre le capital et le travail est impérieuse. Le rapport de Jean-Marc Ayrault donne le contenu audacieux à ce projet de démocratie dans les entreprises : élection de représentativité au suffrage universel pour les organisations syndicales et patronales ; loi de l’accord majoritaire sur une base élective ; présence de représentants salariés dans les conseils d’administration des entreprises ; financement public des organisations syndicales. Au lieu d’une loi de la République uniforme, inappliquée et sans force, voici des accords et des conventions tenant lieu de loi, légitimes parce que représentatifs d’une majorité des salariés concernés, et capables d’assurer le progrès social dans la progression économique de l’entreprise.

Chacun aperçoit la puissance du changement que porte en elle la VIe République. C’est au bout du compte la réconciliation des Français avec la politique et, comme l’a déclaré Ségolène Royal « avec l’entreprise, la vraie », celle qui sert les hommes, les territoires et l’avenir de notre pays.

par Arnaud Montebourg, député de Saône-et-Loire et porte-parole de Ségolène Royal.

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